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vendredi 11 mars 2011

Le città del silenzio (2) (Les villes du silence)





"Dans la cathédrale, très sombre, le sacristain dérangé de sa sieste nous guida vers la chapelle funéraire. Il réclama cent lires de pourboire pour nous allumer une douzaine de cierges munis d'ampoules électriques dont l'intensité ne devait pas dépasser vingt-cinq watts. Dans cette lumière sépulcrale, l'Ilaria paraît encore plus blanche et plus froide. Drapée dans une longue robe, les mains croisées sur la poitrine, les pieds appuyés à un petit chien, la tête soutenue par deux coussins, les bruits du monde ne l'atteignent plus. Le col montant de la robe lui comprime le menton. Cette sorte de jugulaire accentue le détachement du visage et la rigidité du corps. Le diadème, tressé de fleurs, qui entoure ses cheveux, plus qu'un élément ornemental, semble un carcan qui pèse sur son front et la rive au tombeau."


Dominique Fernandez Pise 1951, Grasset, 2010





Lucca

Tu vedi lunge gli uliveti grigi
che vaporano il viso ai poggi, o Serchio,
e la città dall'arborato cerchio,
ove dorme la donna del Guinigi.

Ora dorme la bianca fiordaligi
chiusa ne' panni, stesa in sul coperchio
del bel sepolcro ; e tu l'avesti a specchio
forse, ebbe la tua riva i suoi vestigi.

ma oggi non Ilaria del Carretto
signoreggia la tetra che tu bagni,
o Serchio, sì fra gli arbori di Lucca

rosso vestito e fosco nell'aspetto
un pellegrino dagli occhi grifagni
il qual sorride a non so che Gentucca.

Gabriele d'Annunzio Elettra Le città del silenzio Ed. Mondadori





Lucques

Tu vois au loin les grises oliveraies
qui embrument l'aspect des côteaux, ô Serchio,
et la ville à l'enceinte arborée
où dort la dame de Guinigi.

Ici, elle dort, la blanche fleur de lys
enclose en sa robe, étendue sur la dalle
du beau sépulcre ; et peut-être se mira-t-elle
en toi et ta rive garda son empreinte,

Mais aujourd'hui ce n'est pas Ilaria del Carretto
qui règne sur la terre que tu baignes,
ô Serchio, mais parmi les arbres de Lucques,

rouge vêtu et sombre d'aspect,
un pèlerin aux yeux d'aigle
qui sourit à je ne sais quelle Gentucca.


Traduction : Muriel Gallot (Poèmes d'amour et de gloire, Cahiers de l'Hôtel de Galliffet, 2008)







Images : en haut, Giulia Paltrinieri (Site Flickr)

au centre, Site Flickr

en bas, Corrado Bozzano (Site Flickr)

3 commentaires:

  1. En lisant Dominque Fernandez, on est souvent, très souvent en Italie. J'aime beaucoup cet auteur. J'avais lu "La course à l'abîme" avant d'aller voir l'exposition Caravaggio à Rome l'année dernière, ce qui oblige à voir les toiles avec un œil neuf, avec un autre regard!...

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  2. Je dois dire que je ne partage pas certains partis pris de Fernandez sur l'Italie, mais je le lis toujours avec intérêt : son dernier roman paru ("Pise 51") est vraiment réussi ; j'ai beaucoup aimé la façon dont il évoque l'Italie de l'après-guerre (et plus particulièrement la Toscane : Pise (et sa fameuse Scuola Normale, qui est le lieu principal de l'action), Florence, Lucca, Volterra...) dans un texte qui doit sans doute avoir de fortes résonances autobiographiques.

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  3. Je n'ai pas encore lu celui-là, je vais y songer.

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