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vendredi 17 février 2012

This moment (En ce moment)



"Where are we going, Walt Whitman ?
The doors close in an hour.
Which way does your beard point tonight ?"


"Dove andiamo, Walt Whitman ?
Le porte chiudono tra un'ora.
Dove punta stasera la tua barba ?"





En ce moment où, au nom du "politiquement incorrect", de l'in-nocence ou de la liberté d'expression, certains se croient obligés d'apporter leur soutien à un député obsessionnellement homophobe qui va répétant que le fondement de l'homosexualité est le refus de l'autre, et que ce qui attire l'homosexuel, c'est d'abord et avant tout sa propre image, il est bon de prendre un peu de hauteur pour fendre l'air frais et vivifiant de la poésie de Walt Whitman :

This moment as I sit alone, yearning and thoughtful
It seems to me there are other men in other lands, yearning and thoughtful,
It seems to me I can look over and behold them, in Germany,
Italy, France, Spain
Or far, far away, in China, India or in Russia, talking other dialects,
And it seems to me if I could know these men, I should become 
attached to them as I do to men in my own lands,
O I know we should brethren and lovers,
I know I should be happy with them.

Walt Whitman Leaves of grass, Calamus, 1860 






En ce moment, consumé de désir et songeur, assis tout seul,
Il me semble qu'il y a d'autres hommes dans d'autres pays qui
sont consumés de désir et songeurs,
Il me semble que mon regard peut porter jusque là et que je les
vois en Allemagne, en Italie, en France, en Espagne,
Ou loin, très loin, en Chine ou en Russie, ou au Japon, parlant
d'autres dialectes,
Et il me semble que si je pouvais connaître ces hommes,
je m'attacherais à eux comme je m'attache aux hommes de mon propre pays,
Oh, je suis sûr que nous serions frères et amants,
Je suis sûr que je serais heureux avec eux.


Traduction : Roger Asselineau (Ed. Aubier)



Mentre siedo solo e pensoso, consumato dal desiderio, 
mi sembra che altri uomini, in altre terre, si struggano pensosi.
Mi sembra che potrei alzare gli occhi e vederli, in Germania,
in Francia, nella Spagna, 
Oppure lontano, molto lontano, in Cina, in India, o in Russia, 
dove parlano altre lingue,
E mi sembra che, se potessi conoscerli, 
li amerei come amo gli uomini delle mie terre,
Oh, credo diventeremmo fratelli e amanti,
Credo che sarei felice con loro.

Traduzione : Marina Tornaghi (Ed. Enola, 2000) 








Images : en haut, Mark Skrobola (Site Flickr)

au centre et en bas, CharlesFred (Site Flickr)

4 commentaires:

  1. Magnifique chant au désir de Walt Whitman.
    Le mythe de Narcisse, cher Emmanuel, va si loin, si profond et dépasse l'utilisation restrictive (de ce député) que vous citez.
    Il y a une telle solitude sur la route des êtres humains que parfois l'amour nous touche par cette reconnaissance de l'un dans l'autre. Il faut du temps pour sortir du fusionnel de la passion, pour ne plus se confondre, accepter l'altérité de l'autre, sa singularité, pour se détacher, se délier d'un tout chaotique, aimer en trouvant son autonomie.
    Gombrowicz a écrit de superbes lignes sur ce cheminement complexe.
    "L'homme* dépend très étroitement de son reflet dans l'âme d'autrui..."(*l'homme = l'être humain).
    Je suis heureuse de trouver ici une parole claire et courageuse. Merci.

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    1. Merci de ce commentaire, Christiane ! Je pense comme vous que le mythe de Narcisse dépasse de très loin l'interprétation de ce député, qui se montre, dans ce cas comme dans d'autres, extrêmement simplificateur et caricatural.

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  2. Résistez toujours. Obéissez peu.
    Walt Whitman

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    1. "To the States or any one of them, or any city of the States, Resist
      much, obey little,
      Once unquestioning obedience, once fully enslaved,
      Once fully enslaved, no nation, state, city of this earth, ever
      afterward resumes its liberty."

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