Translate

vendredi 1 juillet 2016

Une voix (Una voce)



In memoriam Yves Bonnefoy (24 juin 1923 - premier juillet 2016)






Souviens-toi de cette île où l'on bâtit le feu
De tout olivier vif au flanc des crêtes,
Et c'est pour que la nuit soit plus haute et qu'à l'aube
Il n'y ait plus de vent que de stérilité.
Tant de chemins noircis feront bien un royaume
Où rétablir l'orgueil que nous avons été,
Car rien ne peut grandir une éternelle force
Qu'une éternelle flamme et que tout soit défait.
Pour moi je rejoindrai cette terre cendreuse,
Je coucherai mon cœur sur son corps dévasté.
Ne suis-je pas ta vie aux profondes alarmes,
Qui n'a de monument que Phénix au bûcher ?



Demande pour tes yeux que les rompe la nuit,
Rien ne commencera qu'au delà de ce voile,
Demande ce plaisir que dispense la nuit
De crier sous le cercle bas d'aucune lune,
Demande pour ta voix que l'étouffe la nuit.

Demande enfin le froid, désire cette houille.

Yves Bonnefoy  Du mouvement et de l'immobilité de Douve, Éditions Gallimard


Ricordati dell'isola in cui si desta il fuoco
Di ogni olivo vivente su scoscesi pendii,
Ed è perché la notte sia più alta e all'alba
Il vento e la sterilità siano pari.
Quei sentieri abbrunati formeranno un regno
In cui restaurare l'orgoglio che fummo,
Nulla rinvigorisce una perenne forza
Quanto un'eterna fiamma e che tutto sia sfatto.
Per me raggiungerò quella terra cinerea,
Distenderò il mio cuore su quel corpo distrutto.
Non son io la tua vita dalle angosce profonde,
Che solo ha un monumento per Fenice sul rogo ?



Chiedi per i tuoi occhi che li rompa la notte,
Nulla comincerà se non dietro quel velo,
Chiedi il piacere che dispensa la notte
D'urlare sotto l'alone di lune inesistenti,
Chiedi per la tua voce che l'affoghi la notte.

Infine chiedi il freddo, anela a queste tenebre.

Traduzione : Diana Grange Fiori (Yves Bonnefoy, L'Opera poetica, I Meridiani, Mondadori, 2010) 




 



Images : grazie a Vincentello (Site Flickr)



1 commentaire:

  1. Comme un frisson de douleur à lire ces lignes. Images de forêts, de maquis dévastés par le feu.
    Comme un émerveillement quand des cendres surgit, longtemps après, un rameau d'espérance.
    Le feu à double visage qui enfante et qui tue...
    Merci pour ces photos de toute beauté et ces chants profonds qui accompagnent l'effort de dire l'ombre des cendres de Yves Bonnefoy.

    RépondreSupprimer