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samedi 23 mars 2013

Oh les beaux jours (Giorni felici)




"WILLIE. (in un soffio) Win.

Pausa. Winnie guarda davanti a sé. L'espressione felice appare, si fa più intensa.

WINNIE. Win ! (Pausa) Oh, ma questo è veramente un giorno felice, sarà stato un altro giorno felice ! (Pausa). Dopo tutto. (Pausa). Finora."







Dans Se souvenir et oublier (éditions Portaparole, 2011), Adriana Asti évoque dans une conversation avec René de Ceccatty sa longue et belle carrière cinématographique et théâtrale. Dans le passage que je cite ici, il est question de son interprétation du rôle de Winnie dans la célèbre pièce de Beckett Oh les beaux jours, mise en scène par Bob Wilson à Paris (Théâtre de l'Athénée-Louis-Jouvet) en 2010 :

Quand j'ai joué Oh les beaux jours de Beckett, j'ai eu le sentiment que tout l'orchestre était plein de Winnie. Toutes pareilles à moi : même ma mère est une Winnie. D'ailleurs si j'avais fait la mise en scène, j'aurais mis maman enterrée dans le parquet de son salon. Papa dans son fauteuil avec son journal. Maman qui parle et papa qui ne l'écoute pas vraiment, mais qui dit :
- Oui, c'est vrai, tu as raison.

Le temps passe, elle meurt, il la suit dans la mort. Winnie, c'est ma mère. Et dans le public, il n'y a que des Winnie. Je ne parle pas d'inconnues, mais de femmes qui sont dans ma situation. C'est la beauté de cette pièce. Alors que si je fais Viola dans La Nuit des Rois, il n'y a pas tant de Viola que ça dans le public. Des Lady Macbeth, si, c'est possible. En tout cas, pas autant que de Winnie ! Beckett a écrit pour le monde entier. Moi, je vois ma mère enterrée dans son parquet parfaitement ciré. elle disait qu'une bonne devait s'agenouiller pour bien briquer le parquet. Le balai, la cireuse ne suffisent pas. Il faut se mettre à genoux. Voilà, c'est ce que je vois en jouant Winnie. mais je crois que chaque spectateur voit sa famille, ses proches. C'est le génie universel de Beckett.

Adriana Asti  Se souvenir et oublier  Portaparole, 2011











Images : Adriana Asti dans Oh les beaux jours ! de Samuel Beckett, mise en scène de Bob Wilson

1 commentaire:

  1. Quelle tendresse dans ce beau témoignage. Ah, cette Winnie... inoubliable...

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