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mardi 28 avril 2015

Candele (Cierges)




 KEPIA

Του μέλλοντος οι μέρες στέκοντ' εμπροστά μας
σα μια σειρά κεράκια αναμένα –
χρυσά, ζεστά, και ζωηρά κεράκια.

Οι περασμέμες μέρες πίσω μένουν,
μια θλιβερή γραμμή κεριών σβυσμένων·
τα πιο κοντά βγάζουν καπνόν ακόμη,
κατάμαυρα κεριά, κυρτά, λυωμένα.

Δεν θέλω να τα βλέπω·με λυπεί η μορφή των,
και με λυπεί το πρώτο φως των να θυμούμαι.
Εμπρός κυττάζω τ'αναμένα μου κεριά.

Δεν θέλω να γυρίζω, να μη διώ και φρίξω
τι γρήγορα που η σκοτεινή γραμμή μακραίνει,
τι γρήγορα που τα σβυστά κεριά πληθαίνουν.

Κωνσταντίνος Καβάφης






 Candele

Stanno i giorni futuri innanzi a noi
come une fila di candele accese –
dorate, calde e vivide.

Restano indietro i giorni del passato,
penosa riga di candele spente :
le più vicine danno fumo ancora,
fredde, disfatte, e storte.

Non le voglio vedere : m’accora il loro aspetto,
la memoria m’accora del loro antico lume.
E guardo avanti le candele accese.

Non mi voglio voltare, ch’io non scorga, in un brivido,
come s’allunga presto la tenebrosa riga,
come crescono presto le mie candele spente.

Costantino Kavafis

Traduzione : Filippo Maria Pontani








Cierges

Les jours futurs se dressent devant nous
comme une file de cierges allumés –
dorés, chauds et pleins de vie.

Les jours passés demeurent derrière nous,
triste rangée de cierges éteints :
les plus proches fument encore,
froids, fondus et penchés.

Je ne veux pas les voir : leur aspect m'attriste,
comme m'attriste le souvenir de leur lumière passée.
Et je regarde devant moi les cierges allumés.

Je ne veux pas me retourner, de peur de découvrir en tremblant
comme la sombre rangée s'allonge vite,
comme grandit vite le nombre de mes cierges éteints.

Constantin Cavafis

(Traduction personnelle)








Images : (1) et (2) Francesco Pappalardo  (Site Flickr)

(3) Stefania Galazzo  (Site Flickr)


6 commentaires:

  1. Oh... La chandelle est éteinte mais elle fut lumière.
    Flamme précaire où règne un souvenir...
    Les jours passés ont leur lumière qui veillent, flammes douces qui raniment ce qui n'est plus.
    Ainsi les douces et rêveuses "Madeleine" de Georges de La Tour et leur clair-obscur ou cet enfant mis en vignette (quel peintre ? quel tableau ?).
    Une flamme attend... un signe. Apaisante.
    Vie lente. Passé juste exilé. Front pensif.
    Quant aux jours futurs... Page blanche...

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    1. C'est un tableau de Trophime Bigot (1579 - 1650), parfois appelé "Le Maître à la chandelle" ; le tableau s'intitule "Jeune garçon éclairant une chauve-souris à la flamme".

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    2. Quelle beauté, ainsi agrandi ! toutes ces ombres -ocres, terre de sienne brûlée, noirs profonds et les ocres jaunes lumineux, les rouges. Merci pour la découverte.

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  2. Je retrouve dans les livres de Pascal Quignard une approche de ce clair-obscur, de cette nuit qui sertit les chandelles éteintes. Je les lie à ce magnifique poème de Kavafis :
    « Nul ne saura jamais ce qu’il y avait tout au fond, dans les ténèbres, avant sa vie. C’est si continu. C’est si confus. C’est sans mémoire. Nuit dulcifiante de Léonard. Nuit irruptrice du Caravage. Nuit méditative de Georges de La Tour. Nuit profonde et antérieure et toujours interne de Rembrandt. Nuit violente et courroucée de Goya. Nuit glacée de Stoskopff. Nuit charbonneuse de Courbet. Nuit solennelle de Trophime Bigot. Nuit anxieuse de Honthorst. Nuit mortelle et irrémissible de Zurbaran. Nuit épouvantable du dernier Géricault. Ovide a écrit, exilé, solitaire, mourant, sur les bords du Danube : Quantum mortalia pectora caecae Noctis habent ! De quelle quantité de Nuit totalement aveugle sont remplies les poitrines des mortels ! ("La nuit sexuelle" - P.Quignard)

    « Le peintre était occupé à peindre une table : un verre à moitié plein de vin rouge, un luth couché, un cahier de musique, une bourse de velours noir, des cartes à jouer dont la première était un valet de trèfle, un échiquier sur lequel étaient disposés un vase avec trois œillets et un miroir octogonal appuyé contre le mur de l’atelier. » ( la composition de la Nature morte à l’échiquier de Baugin).
    Sainte Colombe précise le motif de la vanité : « Tout ce que la mort ôtera est dans sa nuit, souffla Sainte Colombe dans l’oreille de son élève. Ce sont tous les plaisirs du monde qui se retirent en nous disant adieu. »
    Puis, il compare le pinceau du peintre à l’archet : « Écoutez le son que rend le pinceau de M. Baugin. Ils fermèrent les yeux et ils l’écoutèrent peindre. M. de Sainte Colombe dit : « Vous avez appris la technique de l’archet. » ("La leçon de musique" - P.Quignard)

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  3. Ne pas se retourner pour ne pas être changé en statue de sel? Et pourtant, il reste encore, flottant dans l'air, le parfum de ces chandelles éteintes et des visions passées à l'ombre...

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