Je cite ici deux extraits du dernier ouvrage de Giuseppe Culicchia, Sicilia, o cara. Comme l’indique le sous-titre, Un viaggio sentimentale, l’auteur y évoque des souvenirs d’enfance, liés à sa découverte de la Sicile en 1972 (et plus spécialement de la ville de Marsala, que son père avait quitté vingt-cinq ans plus tôt pour chercher du travail à Turin). Le ton est souvent mélancolique et nostalgique, et le rythme de la narration plutôt contemplatif, bien loin en tout cas de la frénésie volontairement répétitive du précédent livre de Culicchia, Brucia la città. Tutte le volte che torno a Marsala faccio in modo di passare almeno una sera seduto con le gambe penzoloni sul pelo dell’acqua all’estremità del molo per Mozia, guardando l’isola che si staglia nera contro il cielo invaso dal rosso del sole sul punto di tramontare al di là dell’orizzonte, nel breve tratto di mare che da qui sembra quasi unire, anziché separare, Marettimo e Favignana. In quel punto non si sente altro rumore che quello del mare e del vento. Se chiudo gli occhi mi rivedo in barca con mio padre, mia madre, mia sorella, con Nuzzo e il barcaiolo. È di nuovo il 1972. Siamo ancora tutti vivi. Sono ancora bambino. Poi li riapro.
(...)
L’alba a Marsala quando tutto si risveglia al sorgere del sole e il mare e il vento, o la sua assenza, ti dicono che giornata sarà, e il profumo di pini che ti fa venire voglia di andare a correre lungo la litoranea.
Cerco di immaginarmi come possa essere diversa l’alba a Marsala per chi a Marsala ci è nato e vissuto : l’alba dei panettieri, l’alba dei giornalai, l’alba di chi lavora nelle cantine e di chi ad agosto si alza dal letto per andare a vendemmiare. L’alba dei pescatori e l’alba dei militari, l’alba dei pasticceri e l’alba dei baristi. Di sicuro anche per loro c’è stato un giorno in cui da bambini si sono svegliati tanto presto la mattina e hanno pensato che la luce dell’alba rendesse Marsala ancora più splendente e meravigliosa che mai.
Marsala, dopo che ci sei stato, non ti lascia più. Impossibile dimenticarla. Al tramonto, ammirata da uno dei moli che si allungano sulle acque basse dello Stagnone, Marsala si tinge d’oro e di rosso e splende di una luce calda nel silenzio rotto solo dal rumore del mare. Tu la guardi un’ultima volta e non puoi fare a meno di riprometterti di tornare a trovarla, un giorno.
Giuseppe Culicchia Sicilia, o cara Feltrinelli ed., 2010
Toutes les fois que je reviens à Marsala, je m’arrange pour passer au moins une soirée assis les jambes pendantes au-dessus de l’eau à l’extrémité de
l’embarcadère pour Mozia, à regarder la silhouette noire de l’île qui se détache sur le ciel envahi par le rouge du soleil qui s’apprête à basculer de l’autre côté de l’horizon, dans le bras de mer qui d’ici semble unir, plutôt que séparer,
Marettimo et
Favignana. À cet endroit, on n’entend pas d’autre bruit que celui de la mer et du vent. Si je ferme les yeux, je me revois
dans une barque avec mon père, ma mère, ma sœur, Nuzzo et le batelier. Je me retrouve en 1972. Nous sommes tous encore vivants. Je suis encore un enfant. Et puis je rouvre les yeux.
(...)
L'aube à Marsala, quand tout se réveille avec le lever du soleil, et la mer et le vent, ou son absence, te disent à quoi ressemblera la journée, et le parfum des pins qui te donne envie d’aller courir sur la route côtière.
J’essaie de m’imaginer combien l’aube à Marsala peut être différente pour ceux qui y sont nés et y ont vécu : l’aube des
boulangers, l’aube des marchands de journaux, l’aube de ceux qui travaillent dans
les chais, de ceux qui en août se lèvent pour aller
vendanger. L’aube des
pêcheurs et l’aube des militaires, l’aube des
pâtissiers et l’aube des garçons de café. Il y a certainement eu pour eux aussi un jour où, enfants, ils se sont levés le matin très tôt en pensant que la lumière de l’aube rendait Marsala encore plus resplendissante et plus merveilleuse que jamais.
Quand on est allé à Marsala, on ne peut plus l’oublier. Au crépuscule, quand on l’admire depuis
l’un des môles qui s’étendent sur les eaux basses du
Stagnone, Marsala se teinte d’or et resplendit d’une lumière chaude dans le silence seulement rompu par le bruit de la mer. On la regarde une dernière fois et on ne peut pas faire autrement que de se promettre d’y revenir, un jour.
(Traduction personnelle)Image :
Site FlickrGiuseppe Culicchia parle de Sicilia, o cara (en italien)Quelques comptes rendus de lecture :
La RepubblicaCorriere della seraLa StampaUn autre compte rendu
ici.
Murieduri, un site consacré à Giuseppe Culicchia.