"Bald, bald, Jüngling, oder nie..."
Je suis venu, calme orphelin
Riche de mes seuls yeux tranquilles,
Vers les hommes des grandes villes :
Ils ne m'ont pas trouvé malin.
A vingt ans un trouble nouveau,
Sous le nom d'amoureuses flammes,
M'a fait trouver belles les femmes :
Elles ne m'ont pas trouvé beau.
Bien que sans patrie et sans roi
Et très brave ne l'étant guère,
J'ai voulu mourir à la guerre :
La mort n'a pas voulu de moi.
Suis-je né trop tôt ou trop tard ?
Qu'est-ce que je fais en ce monde ?
Ô vous tous, ma peine est profonde :
Priez pour le pauvre Gaspard.
Paul Verlaine Sagesse
Io sono venuto, calmo orfanello,
Ricco solo del mio sguardo tranquillo,
Verso gli uomini delle grandi città :
Non mi hanno trovato scaltro.
A vent'anni un turbamento nuovo,
Sotto il nome d'amorosa fiamma,
Mi ha fatto trovar belle le donne :
Loro non mi hanno trovato bello.
Benché senza patria e senza re
E non essendo neanche prode troppo,
Ho voluto morire alla guerra :
La morte non ha voluto me.
Troppo presto sono nato, o troppo tardi ?
Che cosa sto facendo a questo mondo ?
Oh tutti voi, il mio dolore è profondo :
Pregate per il povero Kaspar !
Traduzione : Diana Grange Fiori
Images : en haut, Friedrich Schelle Kaspar Hauser Denkmal, Ansbach (photographie de Michael Zaschka)
au centre et en bas, extraits du film de Werner Herzog Jeder für sich und Gott gegen alle (L’Énigme de Kaspar Hauser)
Que de solitude, de détresse dues à l'hostilité des autres, vécues par Gaspard Hauser, apparu en 1828, à Ansbach, en Bavière avec cette lettre à la main.
RépondreSupprimerJ'ai connu l'écriture de Peter Handke "Gaspard" sur ce mystère d'identité, sur ce sans-langage. Sa parole lui a été dérobée par une longue séquestration puis à nouveau volée par la rééducation intensive de ses geôliers "bien-pensants", trompé par ces paroles logiques et invraisemblables. Gaspard se divise, ne sait plus qui il est...
J'ai assisté à une représentation de cette pièce, terrifiante, vertigineuse. Gaspard est cerné par cette parole qui n'est pas la sienne. Sa dernière phrase , avant de s'écrouler dans les balbutiements puis le silence sur la scène : "Lorsque je suis, j'étais... J'aimerais devenir celui-là même qu'un autre a déjà été."
Ces souvenirs me reviennent, intacts alors que je lis ce billet...
Terrible ce qu'on peut effacer ou mettre au monde par l'éducation... Pouvoir redoutable de la parole....
J'ai oublié ! Merci pour le poème de Verlaine qui rejoint bien le désarroi de Gaspard et cet extrait du très beau film de Werner Herzog.
RépondreSupprimerLe titre allemand du film d'Herzog est vraiment terrible : "Jeder für sich und Gott gegen alle" ("Chacun pour soi et Dieu contre tous"). Kaspar apparaît pour la première fois dans le film sur l'air de Tamino, et il y a vraiment une proximité entre les deux personnages, mais Tamino sort finalement de sa nuit, tandis que Kaspar s'y enfonce jusqu'à la disparition...
SupprimerQuelle finesse dans ce rapprochement... Merci, Emmanuel.
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