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mercredi 20 mars 2013

Il tramonto della luna (Le déclin de la lune)











Le texte de Gesualdo Bufalino que l'on peut lire ci-dessous est extrait de son ouvrage Cere perse (Cires perdues), dans lequel il a réuni quelques uns de ses articles écrits pour différents journaux. Je cite ici le début de l'article intitulé Il tramonto della luna :

La luna era di casa nelle canzoni della mia gioventù. Su nessun testo di poeta ermetico mi sono travagliato come a decifrare l'attacco, arditamente demente, di Luna marinara : «Luna marinara, / l'amore è dolce se non si impara, / se si dice ma...»

Vi furono lune bugiarde, malinconiche, galeotte, appuntamenti con la luna fuori di città, l'astro d'argento luccicò a lungo, con zelo professionale, sul mare di Santa Lucia. Et vi fu Luna lunera, un motivetto spagnolo che mi piaceva stonare, mentre mi sbarbavo nel bagno della pensione. «Luna lunera, cascabelera...» Un vocabolo, questo, che m'intrigò, irreperibile nel mio dizionarietto da tasca, e tuttavia gradevole fra le labbra come un dolciume. So ora che vuol dire "sventata", "pazzarella" ma non mi serve saperlo, non canto più, né un mistero verbale basterebbe a incantarmi. Solo mi chiedo di tanto in tanto se i parolieri apprezzino ancora un pianeta così consumato. Bisognerà che m'informi in giro, non ho pratica, il mio disprezzo per le musicherie odierne è forse ingiusto ma risoluto quanto quello di mio padre per le canzoni che piacevano a me. Pure, da qualche sillaba che m'è capitata di cogliere passando sotto un balcone canoro o aprendo incautamente la radio, ho appreso abbastanza per convincermi che oggi sono di moda linguaggi più decisivi.

Del resto il discredito della luna era cominciato già prima, le sue ultime fortune si ebbero al tempo dei coprifuochi di guerra. Poi fu sempre più difficile alzare gli occhi al cielo, si rischiava di finire sotto una ruota. La campagna in parte si spopolò, in parte si corruppe di case urbane, di luci elettriche ; la luna divenne una cosa da astronomi, grigio ciottolo galeggiante nella negrità degli spazi. Tanto peggio per i superstiti cavalieri della notte, i lunatici, i tiratardi, i guardiani di faro, i baristi by night, i ladri di passo, i pastori erranti, i lupi mannari, le ronde del piacere, le sonnambule, i fornai...

Gesualdo Bufalino  Cere perse  Ed. Classici Bompiani, 2006






La lune est chez elle dans les chansons de ma jeunesse. Jamais sur aucun texte de poète hermétique je n'ai autant peiné que pour déchiffrer le début, audacieusement insensé, de Luna marinara : «Luna marinara, / l'amour est doux si on l'ignore, / si on dit mais...»

 


Il y eut des lunes menteuses, mélancoliques, entremetteuses, des rendez-vous avec la lune loin de la ville ; l'astre d'argent brilla longtemps, avec un zèle tout professionnel, sur la mer de Santa Lucia. Puis il y eut Luna lunera, un petit refrain espagnol que, même si je chantais faux, j'aimais fredonner en me rasant dans la salle de bains de la pension. «Luna lunera, cascabelera...» Un mot, celui-là, qui m'intrigua longtemps, introuvable dans mon petit dictionnaire de poche, et cependant aussi agréable sur les lèvres qu'une friandise.  Maintenant, je sais qu'il signifie "écervelée", "fofolle", mais ça ne me sert plus à rien de le savoir, je ne chante plus, et plus aucun mystère verbal ne suffirait à m'enchanter. Il m'arrive seulement parfois de me demander si les paroliers parviennent encore à apprécier une planète aussi usée. Il faudra que je m'informe autour de moi, le sujet m'échappe complètement ; mon mépris pour les musiquettes d'aujourd'hui est peut-être injuste, mais il est tout aussi résolu que celui de mon père pour les chansons qui me plaisaient. Toutefois, d'après les quelques bribes qu'il m'est arrivé de saisir au vol en passant sous un balcon à sérénade ou en ouvrant imprudemment la radio, j'en ai appris suffisamment pour me convaincre qu'aujourd'hui, la mode est à des vocables plus crus.

 


Du reste, le discrédit de la lune ne date pas d'hier, ses dernières fortunes remontent à l'époque des couvre-feux pendant la guerre. Par la suite, il devint de plus en plus difficile de lever les yeux au ciel, on risquait à tout moment de finir sous les roues d'une voiture. On vit la campagne se dépeupler et se corrompre sous l'afflux des constructions modernes et des lumières électriques ; la lune devint une affaire d'astronomes, un caillou gris flottant dans la noirceur des cieux. Et tant pis pour les derniers chevaliers de la nuit, les lunatiques, les couche-tard, les gardiens de phare, les employés des bars de nuit, les monte-en-l'air, les bergers errants, les loups-garous, les rondes du plaisir, les somnambules, les boulangers...

(Traduction personnelle)






Images : grazie a Aurelio Candido (Site Flickr)

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