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mercredi 18 janvier 2017

Signor Giovanni




Johan Joachim Wincklemann

Trieste, 8 giugno 1768. Muore verso le quattro del pomeriggio fra le braccia insanguinate del cerusico Ezechiel Katz. Ha gli anni di Calamity Jane e il destino di Pier Paolo Pasolini. È il maestro del Bello e fa una brutta fine. Quella notte, nel suo letto all’Osteria Grande, locanda verosimilmente poco appollinea, non ha dormito. L’ha passata con il vicino di stanza, il cuoco pistoiese al momento disoccupato Francesco Arcangeli, fronte bassa, occhi scuri, naso curvo, sopracciglia folte, che di celestiale, decisamente, non ha altro che il cognome. Che cosa lo abbia attirato in un uomo come quello (il vigore degli anni, il fascino della rozzezza ?) sembra un mistero ma non lo è, perché l’amore, come si sa, è cieco. Fatto sta che all’alba, forse ingolosito da certe preziose medaglie che brillano sul comodino, quello ha impugnato  il coltello e, sostituendo una furia all’altra, ha infierito sul suo corpo come un macellaio quando scanna le bestie. 

Delle loro anime si sa poco. Una sarà finita nel nobile paradiso degli esteti, l’altra nell’efferato inferno dei disgraziati. Dei loro corpi si sa tutto. Uno, sfigurato dalla ruota e divorato dal fuoco, ebbe le ceneri disperse al vento : dispregio riservato dalla legge ai sodomiti. L’altro fu inummato con tutti gli onori nel campo comune, dove diventerà cenere come l’altro. L’1 marzo 1833, quando si riesumarono i resti per collocarli in un più degno sepolcro nel Cimitero superiore, non si trovò altro che quella. 

Eugenio Baroncelli   Mosche d'inverno Ed. Sellerio, 2010






Johann Joachim Wincklemann

 Trieste, 8 juin 1768. Il meurt vers quatre heures de l’après-midi entre les bras ensanglantés du chirurgien Ezechiel Katz. Il a l’âge de Calamity Jane et le destin de Pier Paolo Pasolini. C’est le maître du Beau et il a une fin très laide. Cette nuit-là, dans son lit de l’Osteria Grande, établissement vraisemblablement peu apollinien, il n’a pas dormi. Il l’a passée en compagnie de son voisin de chambre, le cuisinier de Pistoie à ce moment-là sans emploi, Francesco Arcangeli, le front bas, les yeux sombres, le nez courbe, les sourcils épais ; décidément, il n’a rien d’angélique, si ce n’est son nom. Qu’est-ce qui a bien pu l’attirer chez un tel homme : la force de l'âge, l’attrait de la rudesse ? Cela ressemble à un mystère, mais ce n’en est pas un, parce que l’amour, c’est bien connu, est aveugle. Toujours est-il qu’à l’aube, peut-être alléché par certaines médailles précieuses qui brillent sur la table de chevet, l’homme s’est emparé d’un couteau et, passant d’une fougue à l’autre, il s’est acharné sur son corps comme un boucher lorsqu’il égorge les bêtes. 

Sur le destin de leurs âmes, on ne sait pas grand-chose : l’une a dû rejoindre le noble paradis des esthètes, l’autre l’impitoyable enfer réservé aux voyous. En revanche, on n’ignore rien de ce que devinrent leurs corps : l’un fut écartelé sur la roue et dévoré par le feu, avant que l’on ne disperse ses cendres dans le vent, selon la punition prévue par la loi pour les sodomites ; l’autre fut inhumé avec tous les honneurs dans le cimetière commun, où lui aussi il va finir par se dissoudre. Le premier mars 1833, lorsque l’on exhuma les restes pour les placer dans un tombeau plus digne, dans le Cimetière supérieur, on ne trouva plus que de la cendre. 

(Traduction personnelle)








Images : en haut, Renaud Camus (Site Flickr

au centre, Claudia Dias (Site Flickr

en bas, Site Flickr



1 commentaire:

  1. La mort peut être plus douce, Emmanuel. Quelque part, loin d'ici, une de vos lectrices a veillé sa maman âgée jusqu'à l'adieu.
    Auriez-vous (pardonnez mon culot) des images douces, un texte à l'amble pour elle. Je sais qu'elle vient souvent butiner la beauté et le réconfort ici...

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