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mercredi 4 janvier 2017

Lo fanno davvero (Ils le font vraiment)




Dans un joli petit livre intitulé Lampadine (Ampoules), Masolino d'Amico, professeur et traducteur de littérature anglaise, a réuni une suite de courts textes : souvenirs, anecdotes, portraits, autour de grands personnages de la culture italienne qu'il a pu côtoyer dès son enfance (il était de fait très privilégié puisqu'il est le fils de la grande scénariste Suso Cecchi d'Amico (fille de l'écrivain et critique Emilio Cecchi) et du critique musical Fedele d'Amico ).  Masolino d'Amico a épousé Benedetta Craveri, fille d'Elena Croce et petite-fille de Benedetto Croce. Autant dire que l'on ne devait pas s'ennuyer dans les réunions de famille ! Gabriele Baldini, qui est cité dans ce passage, est un essayiste et un grand spécialiste de littérature anglaise (il a été l'élève de Mario Praz, et l'époux de Natalia Ginzburg).

Gabriele Baldini aveva frequentato da giovane la casa di Benedetto Croce, come cauto corteggiatore di una delle sue figlie.  «Lui non mi rivolgeva la parola quasi mai, né io, intimidito com'ero, osavo parlargli per primo», mi raccontava. «Però lo ascoltavo a bocca perta. E lo osservavo. Una volta che ci alzammo tutti da tavola e lui si avviò verso il suo studio lo seguii senza farmi notare e lo spiai dalla porta rimasta socchiusa.
«Il filosofo si diresse verso la sua scrivania. Si sedette.
«Io sarò rimasto a guardarlo per almeno mezz'ora. Lui non si mosse mai. Non scriveva, non leggeva. Però nemmeno dormiva : aveva gli occhi aperti.»
A questo punto Gabriele faceva una pausa drammatica. 
«Hai capito, Masolino ? Pen-sa-va !»  

Masolino d'Amico Lampadine, Ed. Il Mulino, 1994

Gabriele Baldini avait fréquenté dans sa jeunesse la maison de Benedetto Croce, en qualité de prudent soupirant de l'une de ses filles. «Il ne m'adressait presque jamais la parole, et comme il m'intimidait beaucoup, je n'osais pas lui parler le premier, me racontait-il. Toutefois, je l'écoutais bouche bée. Et je l'observais. Une fois, tandis que nous quittions la table et qu'il se dirigeait vers son bureau, je le suivis sans me faire remarquer et l'épiai depuis la porte restée entrouverte.
Le philosophe se dirigea vers sa table de travail. Il s'assit.
J'ai dû rester à l'observer pendant une bonne demi-heure. Il n'a jamais bougé. Il n'écrivait pas, il ne lisait pas. Cependant, il ne dormait pas : ses yeux étaient ouverts.»
À ce moment-là, Gabriele marquait une pause solennelle.
«Tu as compris, Masolino ? Il pen-sait

(Traduction personnelle)








Images : en haut, Source

en bas, Renaud Camus  (Site Flickr)



1 commentaire:

  1. Oh, c'est si rare et tellement juste ce regard posé sur l'immobile. Oui, c'est tout à fait possible que le corps se pose et se rétracte jusqu'à n'être qu'une coque où la pensée se love comme dans une noix.
    La photo de ce bureau éveille un beau souvenir...
    Mais où allez-vous chercher ces petits miracles d'écriture ?
    Le billet racontant cette farce du repas falsifié m'a beaucoup amusée mais je n'ai rien écrit car je ne savais que dire.

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