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mardi 9 septembre 2014

Mangeurs de feu




The Young Fire Eaters of Mexico City

They fill their mouths with alcohol
and blow it over a lighted candle
at traffic signs. Anyplace really,
where cars line up and the drivers
are angry and frustrated and looking
for distraction — there you'll find
the young fire eaters. Doing what they do
for a few pesos. If they're lucky.
But in a year their lips
are scorched and their throats raw.
They have no voice within a year.
They can't talk or cry out —
these silent children who hunt
through the streets with a candle
and a beer can filled with alcohol.
They are called milusos. Which translates
into "a thousand uses."

Raymond Carver  Ultramarine, 1986






I piccoli mangiatori di fuoco di Città del Messico

Si riempiono la bocca di alcol
e lo spruzzano su una candela accesa
ai semafori. Anzi, dove capita,
ovunque c'è un ingorgo e gli automobilisti
s'incazzano frustrati e hanno bisogno
di qualche distrazione — lì ci sono sempre
i piccoli mangiatori di fuoco. Fanno quel che fanno
per pochi pesos. Quando gli va bene.
Ma dopo un anno si ritrovano le labbra
strinate e le gole bruciate.
Nel giro di un anno restano senza voce.
Non possono né parlare né gridare —
questi bambini muti che battono
le strade con una candela
e une lattina di birra piena d'alcol.
Li chiamano milusos. Che tradotto
significa "dai mille usi".

Traduzione : Riccardo Duranti  (da Blu oltremare, minum fax, 2003)





Les petits mangeurs de feu de Mexico

Ils remplissent leur bouche d'alcool
et ils le projettent sur une bougie allumée
aux feux rouges. N'importe où, en fait,
dans les embouteillages, quand les automobilistes
excédés s'énervent et cherchent
un peu de distraction — c'est là que l'on trouve toujours
les petits mangeurs de feu. Ils font ça
pour une poignée de pesos. Quand la chance leur sourit.
Mais au bout d'un an ils se retrouvent avec les lèvres
cramées et les gorges brûlées.
En une seule année, ils ont perdu la voix.
Ils ne peuvent plus ni parler ni crier —
ces enfants muets qui vont
par les rues avec une bougie
et une canette de bière remplie d'alcool.
On les appelle milusos. Que l'on pourrait traduire
par "aux mille usages".

(Traduction personnelle)








Images : (1)  Eduardo Quesada  (Site Flickr)

(2) Ruy Sanchez  (Site Flickr)

1 commentaire:

  1. Terrible, ces lignes de R.Carver.
    J'ose y apposer ces lignes de C.Pavese ('Vacance d'août" - La vigne) comme un contre-feu, un hurlement face à une banalisation de cette mort venue du feu.
    "- En été, dit l'enfant, quand le raisin mûrit, dans la vigne on n'entend pas une herbe bouger : si on se tait c'est comme si on hurlait à ne plus rien entendre (...) C'est le bruit du soleil qui cuit la terre."
    Là, c'est le bruit de la flamme qui brûle ces bouches enfantines... dans un grand silence...

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