L'univers élégant : le titre du deuxième CD du jeune auteur compositeur et interprète Gianluca De Rubertis, originaire des Pouilles, lui va comme un gant : des arrangements subtils, une voix de crooner à la tonalité très grave, profonde, du côté de Leonard Cohen, de Nick Cave ou de Paolo Conte, mais un univers vraiment personnel et effectivement élégant... Il y a beaucoup de mélancolie dans ses chansons, une grande lucidité sceptique, une ironie qui tient à distance la douleur, celle des blessures de l'enfance qui brûlent encore quand on y repense (Brucia comme brucia) ou celle des tourments amoureux (Sotto la tua gonna).
De Rubertis sait que la vie est un rêve qui peut virer au cauchemar, et qu'il y a des secrets protégés par des formules cabalistiques qu'il vaut mieux ne pas révéler, comme dans Labbracadabra, qui cache son mystère derrière des allitérations ironiques. L'inspiration est multiple : de la désenchantée Chiedi alla polvere, allusion au roman de John Fante, au franciscain Cantico di una creatura, jusqu'au nocturne rêveur de l'instrumental Chiaro di luna siderale. Il n'y a qu'une seule adaptation, celle d'une chanson enjouée d'Adamo de 1966 Tenez-vous bien, devenue ici Magnifica notte, un hymne mélancolique à la splendeur de la nuit, quand elle nous fait croire que tout est encore possible et que rien ne pourra jamais nous empêcher de réaliser nos rêves et de vivre notre vie...
L'extrait que je propose ici est un duo avec Amanda Lear, Mai più, dans lequel leurs deux belles voix graves et rauques s'accordent merveilleusement pour évoquer de façon légère et distanciée (l'élégance, toujours !) la cruauté et le déchirement du never more, le mai più, le jamais plus. Je recommande vraiment ce très beau disque, disponible sur les sites de vente en ligne, par exemple ici.
Jamais plus (paroles et musique : Gianluca De Rubertis, 2016, Traduction personnelle)
Si l'on en juge par la conclusion
C'est une affaire qui ne peut pas finir
Jamais plus, jamais plus
Tu cherches parmi les hommes des mots subtils
Tu cherches dans les champs des langues inconnues
Jamais plus, jamais plus
Jamais plus le miracle de nos bouches réunies
Jamais plus les courbes de ton regard sur moi
Maintenant il ne reste plus beaucoup de mots
Seulement quelques-uns et je ne veux pas les dire
Jamais plus, jamais plus
Est-ce que tu crois en la résurrection ?
Ce n'est pas un plat que l'on puisse commander
Jamais plus, jamais plus
Jamais plus le miracle de nos bouches réunies
Jamais plus les courbes de ton regard sur moi
Jamais plus de figures planes avec un solide
Jamais plus, jamais plus
Je sens ta joue contre la mienne et tu n'es pas là
Crois-tu que si c'était une maladie
Nous ne trouverions pas le moyen de guérir ?
Jamais plus, jamais plus
J'ai mille collections de phalènes
Mais pas une seule maison que je puisse t'ouvrir
Jamais plus, jamais plus
Jamais plus le miracle de nos bouches réunies
Jamais plus les courbes de ton regard sur moi
Jamais plus de figures planes avec un solide
Jamais plus, jamais plus
Je sens ta joue contre la mienne et tu n'es pas là
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