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samedi 21 juin 2014

Les Beaux étés



 "Toujours !"






Les beaux étés à la veille des guerres 
les beaux étés où l'enfance est troublée 
tout finit par le meurtre 
et le sable des plages est froid désormais 
Dans les yeux des vieillards 
tremble la peur de vivre et d'être seul 
Les beaux étés où les jardins sont clos 
les beaux étés où commence l'automne 
tous les prés ont été incendiés 
et dans le soir les feuilles sont tombées 
Rien ne sera jamais comme autrefois 
mais je me souviendrai toujours 
des beaux étés aux scarabées des roses 
les beaux étés où tout était mensonge. 

Bernard Delvaille   Panicauts ou Le voyage d'été (in Œuvre poétique La Table Ronde, 2006)






Images : en haut, Claude Monet  Été  (1874) 

en bas, Claude Monet  Hôtel des Roches Noires, Trouville  (1890)


 

2 commentaires:

  1. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  2. Ce beau poème de Bernard Delvaille interroge le sens de la vie, la douleur de vivre, la fin des illusions, la mort.
    Dans la vignette : "L'été" de Camus...
    Il écrit : "J'aperçois ici que l'espoir ne peut être éludé pour toujours et qu'il peut assaillir ceux-là mêmes qui s'en voulaient délivrés ...l’œuvre tragique pourrait être celle, tout espoir futur étant exilé, qui décrit la vie d'un homme heureux. Plus la vie est exaltante et plus absurde est l'idée de la perdre(...) Si Faust et Don Quichotte sont des créations éminentes de l'art, c'est à cause des grandeurs sans mesure qu'ils nous montrent de leurs mains terrestres. Un moment vient où la création n'est plus prise au tragique. L'homme alors s'occupe d'espoir (...) Son verdict incroyable acquitte, pour finir, ce monde hideux et bouleversant où les taupes elles-mêmes se mêlent d'espérer."
    (Essai rédigé et publié en... 1942. Cycle de l'absurde Albert Camus "Le mythe de Sisyphe") - Gallimard
    Ou encore pour revenir à "L'été", dans "Noces à Tipasa"(1936) : "... l'incessante éclosion des vagues sur le sable me parvenait à travers tout un espace où dansait un pollen doré. Mer, campagne, silence, parfums de cette terre, je m'emplissais d'une vie odorante et je mordais dans le fruit déjà doré du monde, bouleversé de sentir son jus sucré et fort couler le long de mes lèvres. Non, ce n'était pas moi qui comptais, ni le monde, mais seulement l'accord et le silence qui de lui à moi faisait naître l'amour."
    ou, dans "Le minotaure"(1939) inclus dans "l'été" : "Pour être épargné, il faut dire "oui" au minotaure. c'est une vieille et féconde sagesse. Au-dessus de la mer, silencieuse au pied des falaises rouges, il suffit de se tenir dans un juste équilibre, à mi-distance des deux caps massifs qui, à droite et à gauche, baignent dans l'eau claire. (...) le voyageur reçoit le prix de sa délivrance : la petite pierre sèche et douce comme un asphodèle, qu'il ramasse sur la falaise. Elle est au commencement de tout..."

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