I
Vers deux heures la place autodrome est calmée
Et la parole éternelle est à la fontaine
Et l'insomnie écoute et devient fête.
La couche devant la fenêtre devient règne.
Toute la Ville en cercle à ce chevet,
Assise sur ses collines presque insensibles,
Dit ses noms un par un comme pour des visites,
Sixtine et mon forum des chats et Transtévère.
Il reste encore une heure avant que le jour naisse
(Les nuits d'amour ont de ces rémissions pures),
Couleur du racontement vert de la fontaine,
Couleur d'eaux de printemps encor troubles des crues
Quand le Tibre est opale et algue et sable pâle.
Et deux heures peut-être avant que monte au ciel
La gerbe, éclatée en bonheur, des hirondelles.
II
Rome profuse en hirondelles,
Rien que pour elle, Rome, rien qu'en faveur d'elles,
Je te le dis, tu aurais mon pardon.
Tes hurlements à mort sous ce balcon
Et tant de fois ton stupre en place de Venise
Et tes rauquements de succube à la bêtise
Et ton poignard tiré contre tu sais Laquelle,
En avons-nous saigné, splendide infâme !
Or c'est un crime en rêve et absous ; comme un sable
Que la mer au matin découvre, et qui est pur.
O ma pardonnée injustement d'être belle,
Ce n'est pas tant pour ta place du Panthéon
Où s'encapuchent de rouge les haridelles,
Pour tes peuples peinture ou marbre, pour la dame
Qui au café Greco dit sa glace au melon,
La cuillère levée, à voix qui presque pâme,
Pour le jaune fable des tuiles sur Tibur ;
C'est pour tes matins d'hirondelles.
Marcel Thiry Songes et Spélonques, 1973
Images :en haut, Site Flickr
en bas, Site Flickr
« Il reste encore une heure avant que le jour naisse
RépondreSupprimer(Les nuits d'amour ont de ces rémissions pures) »
Vous avez bien fait de creuser l'obscur sujet Thiry, cher E.F. !
Encore une découverte que nous devons à RC ! J'ai trouvé sur Amazon une anthologie éditée chez Seghers en 1975, et je trouve cela merveilleux : je n'ai pas fini de le citer !!
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