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dimanche 2 mars 2014

Parmi les ombres



"Ombra che, stanca, ti allontani da me
 Nella vita cos'è che ti manca ?" 






Trois extraits du chapitre "Lieux d'autrefois", dans l'ouvrage de Gesualdo Bufalino Musée d'ombres :


‘U CINIMA «BALILLA» 

Sopra un immenso lenzuolo, in fondo a quel vecchio magazzino dietro la piazza, si avvinsero e si baciarono, come grosse larve, John Gilbert e Greta Garbo, in un silenzio di tomba. Né bastò alla fine Ridolini, nella sua lunare follia di cinque minuti, a riportare il sorriso sulle pallide asciutte labbra dei giovanotti in loggione ; inutilmente con dita di ferro Don Peppino Costanzo intonò, sui tasti bianchi e neri del suo strumento, La Violetera.






LE CINEMA «BALILLA» 

Sur un immense drap, au fond de ce vieil entrepôt derrière la place, s’étreignirent pour un long baiser, tels deux fantômes à la mine plâtreuse, John Gilbert et Greta Garbo, au milieu d’un silence de tombe. Et même Ridolini ne parvint pas, dans les cinq minutes de folie lunaire données en fin de spectacle, à ramener le sourire sur les lèvres pâles et sèches des jeunes gens du poulailler ; vainement, de ses doigts de fer, sur les touches noires et blanches de son instrument, Don Peppino Costanzo attaqua La Violetera



 
 
 
 


'U TEATRU 

Eppure ci fu una sera in cui, sotto le volte di un soffitto tutto stucchi, sfolgorarono vampe d’oro e crepitarono battimani ; in cui scarpette di raso calcarono gli scalini che ora ingombra e consuma l’ortica. Venne lei, la Patti, la divina Adelina, la voce più bella del secolo, e per otto onze, secondo il contratto controfirmato dal Marchese Ferreri, apparve alla ribalta entro il cerchio di un grande lampadario di cristallo, bianca di luce e di cipria, come un angelo di cera. Poi si perse per sempre nel buio, in un galoppo di fragorosa carrozza. Ne parlarono  a lungo i vecchi, seduti sulle soglie, nei pomeriggi d’estate. 



 LE THEÂTRE 

Pourtant il y eut bien ce soir où, sous les voûtes d’un plafond tout de stucs, resplendirent des flammes d’or et crépitèrent des applaudissements ; où de petits souliers de satin foulèrent les marches qu’envahit maintenant et que ronge l’ortie. Elle y vint, elle, la Patti, la divine Adelina, la plus belle voix du siècle, et pour huit onces, selon les termes du contrat portant le contreseing du marquis Ferreri, elle parut sur la scène au centre de la clarté, sous un grand lustre de cristal, blanche de lumière et de poudre, telle un ange de cire. Et puis elle se perdit à jamais dans la nuit, disparue au galop fracassant d’un carrosse. Et de ce soir longtemps après parlèrent les vieillards, assis au seuil de leur demeure, par les après-midi d’été.






‘A MANDRETTA 

Sotto questa bucolica insegna una vasta baracca, con l’ingresso sul viale, ospitò nei primi illusi anni del dopoguerra una minuscola orchestrina e tre ragazze dalla bocca troppo dipinta. Più di un marito disertò per loro l’antico venerabile talamo ; più di un adolescente attinse con mani notturne al portafoglio paterno, per gustare, guancia a guancia, i dolcissimi inferni di una canzone che si chiamava Begin’ the beguine.


«LE PETIT TROUPEAU» 

Sous cette enseigne bucolique, une grande baraque, ouvrant sur l’Avenue, accueillit, au cours des premières années pleines de faux espoirs de l’après-guerre, un minuscule orchestre et trois filles à la bouche trop maquillée. Pour elles, plus d’un mari déserta l’antique et vénérable lit nuptial ; plus d’un adolescent puisa d’une main nocturne dans le portefeuille paternel afin de savourer, joue contre joue, l’enfer exquis que promettait certaine chanson... Le titre en était Begin’ the beguine.






L'édition bilingue de Musée d'ombres, de Gesualdo Bufalino est parue en 2008 dans la collection des Cahiers de l'Hôtel de Galliffet (Traduction : André Lentin et Stefano Mangano


 Image : "Cinema Odeon" Marco Bernardini (Site Flickr)

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